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Publié par acchantonnay

 Je connaissais déjà le Golfe après avoir couru deux fois le 87 km , et l’idée de faire le grand tour me

trottait dans la tête depuis deux ans ; cet automne  la décision ( après l’autorisation de mon épouse )

était prise ; cerise sur le gâteau , un copain , plus rapide que moi , Benoit , s’inscrivait sur la même

distance  et un autre ami Pierrick , ultratraileur expérimenté allait nous assister.

Après une prépa correcte , sans blessure ,  accompagné régulièrement sur les sorties longues de mes

deux compères ( mais aussi  à plusieurs reprises de David et Manu ) du club d’athlé de Chantonnay,

nous sommes donc partis à 3 le matin de la course , direction Vannes .

Après avoir rapidement retiré nos dossards , nous sommes passés voir le stand de Bert dont j’ai fais

la connaissance et qui a gentiment accepté de dédicacer son livre à notre ange-gardien  Pierrick.

Petit stress en début d’après-midi avec des pluies drues mais passagères , qui heureusement vont se

calmer au fil des heures .

Mon épouse et celle de Pierrick nous ont rejoint juste avant le départ , et la musique de Kavinski

retentissant, l’émotion est montée d’un cran ; derniers encouragements entre Benoit et moi et c’est

parti,  Benoit plus rapide , s’éloignant doucement , j’ai quant à moi décidé de partir dès le

début en mode Cyranno 18/2.

C’est un peu frustrant , notamment lorsque l’on sent que les jambes sont bien là , mais je ne sais pas

comment  peut réagir l’organisme sur une telle distance , donc prudence ; autour ça déboule à un

bon rythme.

 

Arrivée à Kerbilouët , km 18 , puis départ en 2H03’ ( 721ème place), le ravito est bondé et je ne m’y

attarde pas .

Chaussé de runnings , je reste prudent , de peur de heurter les racines ou les petites roches qui

affleurent ; pour une fois , je ne ferai pas de vol-plané, contrairement à d’autres autour de moi .

 

 

Arrivée à Port Blanc, km29 , puis départ en 3H38’ (461 ème place) avec le plaisir de voir Pierre et sa

famille venus nous encourager.

Parmi les supporters , le long du chemin , sur un poteau de barrière , nous attend un petit chaton

noir miaulant à chaque caresse reçue des coureurs ; il est là depuis un certain temps puisque Benoit

aussi l’a remarqué .

La vitesse restant très raisonnable nous avons la chance de profiter du paysage avec de belles criques

bordées de superbes maisons .

 

Arrivée à Larmor-Baden , km 36 , départ en 4H42’ (598ème place) avec la tombée de la nuit et je

manque  de repartir sans voir mon assistance perso (ma moitié , Pierrick et son épouse )qui ne

m’avaient pas vu arriver ; j’écoute les conseils , je mange , change de teeshirt , de chaussettes et me

Noke les pieds.

Bien remonté moralement et physiquement, je repars ,  pépère , pour ma première nuit.

Je n’ai que peu de souvenir de cette période jusqu’au lever du jour , bienvenu ,au-delà de Crach .

 

Arrivée au Bono , km 52 , départ en 7H58’ (734ème place) , où j’ai mangé purée , jambon blanc et du

bon riz au lait .

A  Auray , lors d’une belle montée, avec 3 autres coureurs distraits , on arrive enfin au bout de celle-

ci , à un croisement sans rubalise L  , visiblement on a loupé quelque chose … Heureusement , au

même moment passe une patrouille de gendarmerie , on leur explique le problème et , sympas , ils

redescendent la rue avec leur voiture puis remontent pour nous dire qu’effectivement , 300m  plus

bas nous avions loupé un petit panneau fluorescent , bien visible , au début d’une rue sur la gauche.

Soulagés , nous les remercions ,  et rebroussons donc chemin , un peu en pétard contre nous-même.

Ensuite, comme d’habitude , j’ai un peu de mal à rester éveillé entre 3H et 5H du matin .

 

Arrivée à Crach , km 67 ,départ en 10H41’ (720 ème place) , je n’en n’ai aucun souvenir .

Avant d’atteindre , avec impatience , le Port de Locmariaquer , nous longeons la côte avec de

nouveau de superbes paysages .

 

Arrivée à Locmariaquer , km 82 , départ en 13H19’ ( 700 ème place),arrêt des chronos ,  je prends le

temps d’enfiler une troisième couche avant la chasuble et le gilet de sauvetage que l’on me met sur

le dos rapidement et efficacement , aucune attente , je descends direct sur un zodiac où des coureurs

attendent déjà . Visiblement , ils tournent à 6 embarcations.

Départ en douceur , puis le capitaine met les gaz , la mer est calme , on croise un autre zodiac qui

s’amuse à se rapprocher pour créer des vaguelettes , et l’on embarque un peu d’eau , en riant un peu

jaune car un des coureurs avait posé son sac au sol , baignant maintenant dans l’eau salée.

La traversée est bien agréable et rapide , la remontée sur le ponton un peu moins , et les robocops

se remettent lentement en route , le chrono redémarre .

On croise un groupe de jeunes , vers 7H30 ,  pas encore couchés et bien réchauffés puisqu’il y en a un

en simple maillot de bain (alors que j’ai 3 couches ) qui me propose gentiment sa canette de bière .

Il me faut près d’une heure pour gagner le stade , un peu fatigué.

 

Arrivée au stade d’Arzon , km 89 , départ en 14H12’ ( 684 ème place) . Pierrick m’y attends ,

m’encourage , malgré ma flemme à aller me doucher , comme Benoit l’a fait près d’une heure

trente avant , et l’eau est super bonne ; cela fait un bien fou . Je me change totalement ,

me renoke et Pierrick me ramène un plateau repas , je dors ensuite 20 minutes.

Je sais qu’ensuite cela va être long et un peu galère , à la chaleur (relative) et au vent , jusqu’à

Sarzeau .

Le paysage reste vraiment typique du golfe , très découpé , on a une belle vue sur l’Ile aux moines .

On continue à enchainer les montées et des descentes de petits escaliers aux marches bien étroites

pour mes grandes palmes ; j’en ai assez de retirer du sable de mes chaussures , donc  maintenant je

me contente de marcher sur les plages .

 

Arrivée à Port Nèze , Km 100 , tout un symbole , départ en 17H16’ ( 646 ème place) , je ne m’y

attarde pas et la suite va me paraître très longue , d’autant plus que ma Garmin me laisse une

nouvelle fois tomber ;  je n’ai pas bien calculé pour cette portion ma quantité de barres

énergétiques ,et je n’ai plus de nougat à la fraise de chez Gelencser (ben oui , il faut bien se faire

plaisir ;)  ).

C’est donc en hypo que j’arrive à Sarzeau , en marchant de moins en moins  droit

(heureusement que j’ai mes bâtons), inquiétant d’autres concurrents , et j’ai le plaisir de tomber sur

un Fabrice très cool , en train de prendre un café sur une terrasse , avant de démarrer son 56 km .

 

Arrivée donc à Sarzeau , km 122 , départ en 22H13’ ( 566 ème place) cette portion a dû casser pas

mal de coureur. Pierrick me force à manger , et je m’écroule pour une demi-heure de sommeil.

Je change de teeshirt , de chaussettes , et je me renoke les pieds, je me sens nettement mieux .

Christophe vient gentiment m’encourager pour repartir.

Il est 16H31 et la portion suivante va être spéciale car les 56km vont partir à 17H pour donc débouler

dans notre dos ; il va falloir être vigilant , ranger les bâtons et ne pas gêner sur les monotraces.

Du coup cela s’est plutôt bien passé , avec des encouragements mutuels sympas , je revois Fabrice ,

puis Gaëtan  , puis Steve , je crois que j’en oublie d’autres , c’est vraiment agréable , et cela me

booste de nouveau  , m’aidant à trottiner sur une bonne partie du chemin .

Peu avant le prochain ravito , je vois débouler en sens inverse  Christophe , fidèle

supporter, et une partie de sa petite famille attends au ravito , encore merci à lui et à Véronique, cela

fait  toujours du bien ,  tout comme d’ailleurs les bips bips de mon portable qui m’arrivent aux

oreilles régulièrement de nuit comme de jour , témoins des encouragements reçus par SMS , je sais

que mes grands enfants , que certains de mes amis suivent à distance mon parcours.

 

Arrivée donc au Hezo , km 138 , départ en 25H13’ (512 ème place) ; je m’y fais un sandwich ,

recharge les bidons , puis repars en marchant , je suis incapable  maintenant de trottiner L    .

Le prochain ravito est à près de 20 km , le parcours pour y arriver n’est pas très intéressant avec pas

mal de route , je vais le faire en mode zombie .

Une image cependant m’a ému dans mon brouillard , celle d’une gentille petite dame d’un certain

âge , toute seule dans la nuit sur son fauteuil pliant , à un carrefour, présente pour nous guider ; on

ne remerciera jamais assez tous ces bénévoles , de tout âge, qui nous ont encouragés , surveillés ,

nourris , et nous ont simplement permis de faire cette course.

 

Arrivée à Sene , km 158 , départ en 30H30’ (493ème place) . J’y arrive laborieusement , crevé ,

frigorifié , mais heureusement je ne me suis même pas rendu compte du débalisage de certains

petits rigolos, « l’organisation »  patrouille pour corriger les erreurs éventuelles.

Cécile , Pierrick et Nicole sont là pour m’accueillir , m’aider à me changer , m’allonger sur un lit de

camp et me border ; Pierrick doit cependant repartir pour assister à l’arrivée de Benoit à Vannes , un

grand bravo à lui ; son épouse et son grand fils lui ont fait la surprise d’être présents à son arrivée ;

de grandes émotions en perspective J  .

En me retournant dans mon sommeil , je me demande si je n’ai pas vu , sur un autre lit de camp ou à

côté,  des oreilles de lapin , ce doit être un des lapins runners.

Après une demi-heure de sieste , mes supportrices me forcent à bien manger, puis à me couvrir

correctement , car la nuit est fraiche et avec la fatigue , ce peut être franchement désagréable.

Couvert de 4 couches , je sors du gymnase pour la fin de l’UTMB  ;)     .

 C’est reparti pour ma dernière galère de 21 km , mais avec , au bout , le Saint Graal , Vannes .

Motivé , j’essaie de pousser sur mes bâtons, me retrouve seul in the night ;  j’aime vraiment ça , pas

un bruit , hormis soudain un âne qui braie (j’ai vérifié sur internet) sur la rive d’en face , cela résonne

fort sur l’eau .

On a le droit à un petit grain de 10 minutes , sur un passage en bordure de l’eau , bien exposé , qui a

au-moins le mérite de réveiller, après Port Anna .

C’est long , on a l’impression de ne jamais se rapprocher de Vannes , voire parfois de s’en éloigner .

Ma  lampe clignote , je change ma batterie ; une demi-heure plus tard , noir total , jurons ;

heureusement que j’avais pris une frontale de secours , j’aurais eu l’air fin .

 

Maintenant, j’en profite pour écouter une playlist spécialement créée pour l’occasion avec Pink

Floyd  , Coldplay et le dernier London Grammar … c’est un vrai moment de bonheur , je sais que ,sauf

accident ,  je vais arriver au bout de cette course, je n’ai plus de pieds , plus de genoux (je sais , ce

n’est pas très pratique pour courir), je voudrais que ce moment privilégié dure , quelle chance j’ai

d’être là J , en pas trop mauvais état par rapport à d’autres .

Me rapprochant cahin caha du port de Vannes , j’ai une dernière surprise : longeant une haie ,

j’entends un barouf dans celle-ci , je pense à un oiseau effrayé , mais le bruit me suis et se rapproche,

et , soudain , devant ma frontale apparait une espèce de gros ragondin, pas très aimable , qui fait

quelques pas vers moi , fait un drôle de bruit , type grondement-gargouilli , puis repart dans les

arbustes en courant ; je me demande ce qu’on pu penser les coureurs qui suivaient à 200m voyant

un cinglé brandissant ses bâtons et faisant des bonds .

Bref , la fin approche , mais ça n’arrête pas de tournicoter , et on ne voit toujours pas ce fichu port.

Une personne passe en sens inverse , signale encore une demi-heure jusqu’à la ligne d’arrivée ; je

suis un peu déçu , pensant être plus prêt , mais pense que l’on a enfin une estimation fiable après les

« encore 1 km » qu’il faut souvent multiplier par deux ou trois .

Et en effet , ce fameux port apparait , je le remonte, ému , la gorge serrée , c’était donc faisable ,

même pour moi ; je pense à mes proches , à Cécile mon épouse qui a supporté mes absences

répétées , mon humeur perturbée en fin de prépa, mes amis qui m’ont régulièrement encouragés.

Je tente de trottiner les 20 derniers mètres , encouragé par de sympathiques jeunes supporters à

l’arrivée, passe la ligne,  un sourire béat scotché au visage ; un gentil monsieur avec un micro tente

de me poser des questions, je dois avoir répondu des banalités , il me demande , les yeux explosés ,

si je peux éteindre la frontale, je me sens un peu niais , mais je suis si heureux, si heureux de l’avoir

fait J J J J .

Je m’assois enfin pour manger un peu sous un barnum, envoie des SMS pour signaler que je viens de

terminer ,  au bout de 179,7 km , 35H03’ de course , classé 461 ème.

Le pauvre Pierrick qui dormait enfin un peu dans sa voiture accourt , désolé d’avoir loupé mon

arrivée , je le rassure , cela n’a aucune importance , je le remercie , je lui dois beaucoup sur cette

course , ses conseils , sa présence , son aide ont été précieux pour Benoit et moi.

J’ai du mal à imaginer comment cela se serait passé sans cette assistance , c’est un plus ,

un confort indéniable .

Encore un grand merci aux bénévoles , ma famille , mes amis dont Fred , bien entendu .

Respect et bravo à tous les participants de ce weekend , quelque soit la distance parcourue,

finishers ou non .

Philippe

 

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F
Le week end breton a perturbé mon orthographe...
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F
Bravo Philippe! Le récit donnerais presque envie, mais la raison me retient encore... ;)
Répondre